C’est une question qui me taraude depuis longtemps : Lors d’en encadrement d’une photographie, faut-il mettre un verre ou pas de verre ?
Pendant longtemps, par défaut et par facilité je le reconnais, j’en ai mis… Mais je n’étais pas entièrement satisfait en raison de 2 aspects négatifs : Le rendu final, différent et les reflets souvent présents et perturbants pour bien apprécier l’œuvre
Avec l’expérience acquise au cours des expositions, j’en suis arrivé à quelques conclusions que je vais vous partager.
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1- Préambule
Une premier point qui interpelle par rapport à l’utilisation d’un verre protecteur est le fait que les peintures ( à l’huile ou acryliques) en sont toujours dépourvues ou presque. L’exception étant dans les musées, pour certaines œuvres inestimables de Grands Maitres. Et malheureusement on peut comprendre pourquoi quand on voit de plus en plus de nos jours certains actes, dits « protestataires », effectués à l’encontre de telle ou telle œuvre.
Mais dans l’extrême majorité des cas, pas de verre. Alors que la surface, par la technique choisie de l’artiste, n’est pas toujours lisse. Et peut donc faciliter l’accumulation de poussières ou de particules présentes dans l’atmosphère. Bien que le temps puisse altérer les couleurs à cause de la lumière comme certaines études scientifiques l’ont démontré.
NB : Attention je parle de peintures à l’huile ou à l’acrylique sur toile- Pour les aquarelles et pastels sur papier, la situation est tout autre : A cause du support (papier) et de La grande sensibilité des matériaux à l’l humidité.
La photographie a elle-même beaucoup évolué au niveau des techniques et des choix d’impression.
On peut avoir des tirages sur toile, comme en peinture ou des tirages sur plaque d’aluminium, type Dibond® , ou dans des caisses dites « américaines ».
Dans tous ces cas, pas de verre protecteur ! Alors pourquoi en mettre sur un tirage papier ?
2- « Pros & cons »
J’ ai donc essayé de recenser ici les avantages et inconvénients, (les « Pros & cons » comme disent les anglo-saxons) d’un verre protecteur.
2-1 Avantages
– Fournis souvent par défaut
On ne peut pas parler d’avantage mais c’est un fait. Lorsque vous achetez des cadres industriels, ils sont toujours proposés avec leur plaque de verre, voire d’acrylique. Ce qui incite implicitement à utiliser ces dernières, sans trop se poser la question du pourquoi.
– Assurer la planéité
Selon moi, c’est probablement la raison première, voire originelle : Un tirage papier n’aura jamais la rigidité d’une toile montée sur châssis, même si on trouve des papiers très épais pouvant aller jusqu’ à 350 g/m².
Inversement, les laboratoires d’impression proposent même des papiers japonais très fins (L’Unryu ne fait que 55g/m²et le Murakamo 42 g/m² !!).
Donc, sans verre protecteur, la photographie risque, avec le temps, de gondoler. Voire ses bords « rebiquer » si elle est de taille plus petite que le cadre. Et d’autant plus si le support sur lequel elle est fixée est lui-même peu rigide.
– Protection
La raison de la protection est triviale, mais il faut faire 2 remarques :
La première : ne jamais mettre le verre au contact direct avec la photographie. Sinon, c’est prendre le risque que de la condensation se mette entre les 2, lors de changements de température. Condensation qui finira par altérer le tirage (ondulations, voire dénaturation des couleurs).
La 2 ème remarque est plus une question : protéger oui mais par rapport à quoi ? Et là tout dépend de votre environnement
Dans les intérieurs de fumeurs, l’agression va être importante : jaunissement des surfaces dû à la nicotine, dépose sur l’œuvre des particules fines en suspension.
De même si vous habitez une région à fort taux d’humidité (climat tropical ou intérieur très humide en ne chauffez pas assez pendant la saison des pluies). L’humidité va détériorer l’œuvre en altérant sa planéité, voire avec le développement de moisissures à sa surface.
3 -ème possibilité : un environnement très poussiéreux, voire avec du sable en suspension. Pas besoin de dessin, bien que la poussière ne soit pas un réel risque. Il est facile d’épousseter l’œuvre. Pour le sable c’est différent car il peut rayer irrémédiablement la surface de la photographie.
Enfin dernier risque et non des moindres, les UV du soleil attaquent les couleurs. Surtout si vous exposez votre œuvre directement ou presque aux rayons du soleil. Ceux-ci vont dénaturer les couleurs avec le temps, en particulier les rouges. Et la vitesse de dégradation va dépendre du type d’impression. Une impression par jet d’encre pigmentaire résistera beaucoup plus longtemps qu’une impression argentique.
Le verre peut alors apporter une protection à condition qu’il soit traité anti-UV. Et malheureusement les fournisseurs de cadres ne donnent pas beaucoup d’information sur les verres des cadres standards. Donc il vaut mieux considérer qu’ils n’ont pas de traitement anti UV.
Dans le cas d’impression par jet d’encre pigmentaire, un autre risque est la sensibilité à l’abrasion : En effet les encres résisteront mal à un frottement d’ongle par exemple sur la surface. Si vous craignez que des personnes indélicates ou peu soigneuses maltraitent la surface de vos tirages, le verre s’avère une bonne protection.
Les nouveaux types d’impression par exemple UV sur Dibond ® ou PVC allient « permanence » et résistance à l’abrasion
– Conclusion
Donc finalement si votre environnent n’est pas agressif, que vous preniez soin de vos tirages et que vous ne placez pas votre œuvre trop face au soleil (du matin de l’après-midi ou du soir), un verre non traité anti UV n’apportera pas tant d’avantages que cela.
2.2 Inconvénients
– Les reflets
Tous ceux ou celles qui ont une œuvre, photographique ou une aquarelle, sous verre ont fait l’amer expérience des reflets disgracieux sur celle-ci. En particulier en cas d’éclairage, artificiel, orienté vers l’œuvre.
A tel point que lors d’une exposition à laquelle j’ai participé, mes confrères photographes m’ont tout de suite conseillé de retirer les verres de mes œuvres. Mais de les mettre derrière le dos cartonné sur lequel est fixé la photographie pour assurer la planéité. Bien leur en a pris. Et maintenant je garde les verres pour le transport mais les retire quasi systématiquement avant d’accrocher mes œuvres dans une exposition.
J’ai aussi le souvenir d’avoir visité une exposition , il y a quelques dizaines d’années d’un Grand Maitre photographe Japonais. Ses photographies, en très grand format étaient exposées sans aucun verre!
Bien sûr il y a la solution des verres anti-reflets. Mais attention, car il y a différentes qualités d’anti-reflets. Tout d’abord proscrivez les verres proposés par les grandes surfaces de bricolage. L’anti-reflet est appliqué sur les 2 faces et obscurcit la photographie. Il faut privilégier un verre n’ayant qu’une seule face anti-reflet que l’on trouve chez les spécialistes d’encadrement ou verriers. Nous verrons plus bas que le nec plus ultra est d’associer le traitement anti -reflet avec un traitement anti UV.
– -La perte de rendu
Lorsqu’un verre est intercalé entre l’œuvre et le spectateur, on perd quelque chose. Ce quelque chose c’est non seulement l’intensité des couleurs mais aussi le rendu ou le « toucher » dû au papier utilisé par le photographe pour l’impression. En particulier si l’impression est sur un papier mat, et même satiné. Le verre va tendre à rendre « brillant » le tirage. On perd aussi la texture du papier qu’il soit lisse ou au contraire un peu gaufré. Or le photographe attache très souvent une grande importance au choix du papier qu’il va utiliser pour ses tirages, en particulier s’il s’agit de tirages Fine Art (ou tirages d’art).
Personnellement, selon le thème de la photographie je vais choisir différents papiers. Par exemple un papier mat ultra lisse, pour avoir une finesse de détail dans les paysages. Ou un baryté satiné, pour sublimer les couleurs de mes natures mortes. Le choix du papier va contribuer à la beauté finale de l’œuvre, tout autant que la maitrise de l’exposition, la composition ou le développement. Mettre un verre, c’est amputer, malheureusement, une partie de l’œuvre.
3- Pour conclure sur l’encadrement d’une photographie : « verre ou pas verre ? «
Le choix final de mettre ou pas mettre un verre protecteur va donc dépendre de plusieurs facteurs :
Du degré d’agressivité de votre environnement.
De la qualité intrinsèque du papier utilisé lors du tirage.
De votre propre sensibilité à l’importance du rendu final de l’œuvre.
Et comme souvent, tout est affaire de compromis.
Mais je pencherai pour 2 attitudes :
- Soit protéger l’œuvre mais avec un verre de haute qualité, traité anti UV et anti-reflets.
- Soit retirer le verre et le mettre entre le dos cartonné et le fond du cadre pour assurer une bonne planéité, si vous utilisez un cadre industriel.
NB : Pour ceux qui sont craintifs vis-à-vis du risque d’abrasion sur les tirages en impression par jet d’encre pigmentaire, une solution peut être la pulvérisation d’un vernis spécial proposé par certains fabricants de papiers Fine Art. Personnellement je n’ai pas encore testé mais je sais que des confrères l’appliquent.
Voilà, J’espère que cet article vous a plu. N’hésitez pas à me partager votre propre expérience ou vos commentaires
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Quelques sources bibliographiques pour en savoir plus
Pourquoi certains tableaux vieillissent mieux que d’autres (theconversation.com)
Protéger, sauvegarder et entretenir ses œuvres
Pourquoi les pigments rouges s’estompent-ils dans les œuvres d’art historiques?
Comprendre l’altération des couleurs des toiles par Kévin Moris (afis.org)
Pour ceux que la durée de conservation sur les tirages photographiques intéresse, je vous conseille l’article ci-dessous du laboratoire professionnel Picto : Picto Online – Picto actif dans la recherche avec l’École Nationale Supérieure Louis Lumière
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